Les endocrinologues du début du XXème siècle avaient déjà repéré le lien entre insuffisance thyroïdienne et les douleurs articulaires de type rhumatoïde, s’agissant même d’un des symptômes les plus constants ! D’autres études, datant cette fois de la fin du siècle dernier, attestent d’une prévalence trois fois plus grande de la véritable arthrite rhumatoïde chez les sujets souffrant de dysfonctionnement thyroïdien. Depuis une quinzaine d’années déjà, plusieurs auteurs associent la fibromyalgie à un taux insuffisant d’hormones thyroïdiennes actives T3.
Si les premiers articles sont sortis de 1997 à 2003 dans des revues médicales mineures, c’est le fameux Journal of Rheumatology qui publie en 2004 une étude dont les résultats concluent à l’association entre fibromyalgie et pathologies thyroïdiennes auto-immunes. Vous trouverez toutes ces références sur le site internet www.gmouton. com, rubrique « Conferences – Functional Hormonology – Thyroid» (téléchargement gratuit).
Toujours dans le domaine neurologique, il s’avère que les hormones thyroïdiennes exercent un effet neuroprotecteur vis-à-vis des pathologies axonales (axones = fibres nerveuses prolongeant les neurones et permettant leurs interconnexions). Certains vont même jusqu’à voir la démyélinisation des neurones comme une complication de la maladie thyroïdienne auto-immune. Lorsque la gaine de myéline (cet isolant protégeant les axones comme les gaines en plastic coloré isolent les fils électriques) est attaquée par des auto-anticorps, on souffre de ce que l’on appelle la sclérose en plaques, une pathologie auto-immune touchant le système nerveux. Or, le lien entre SEP et thyroïdite auto-immune est bel et bien publié, tout comme l’est le fait que, dans un certain modèle expérimental de démyélinisation, les hormones thyroïdiennes améliorent et accélèrent la remyélinisation...
Nous restons dans la sphère neurologique pour énumérer une série de dysfonctionnements et de pathologies avérées dont l’association étroite avec l’hypothyroïdie a fait l’objet de publications scientifiques. Il s’agit des troubles de l’humeur, de la dépression, de la maniacodépression ou du trouble bipolaire, des troubles cognitifs, du manque de concentration, des pertes de mémoire, de la mélancolie, de l’anxiété, des attaques de panique, de la démence et de la plupart des psychoses. Il est d’ailleurs bien connu dans le monde de la psychiatrie que les hormones thyroïdiennes peuvent radicalement améliorer l’efficacité des traitements médicamenteux à base d’antidépresseurs ou de psychotropes.
On pourrait d’ailleurs s’interroger sur la possibilité d’une action thérapeutique des hormones thyroïdiennes par elles-mêmes, en lieu et place du traitement médicamenteux prescrit d’emblée. Il n’est pas rare de voir certains psychiatres prescrire de la T3 et je dirais même qu’en général, chez les grands déprimés, ils y vont franchement avec les dosages!
Combien de patients reçoivent des antidépresseurs pour traiter leur dépression alors qu’en réalité, il s’agit de patients hypothyroïdiens non diagnostiqués? Je ne prétends pas que c’est une règle absolue, mais en tout cas la recherche d’autres signes et symptômes suggérant une insuffisance thyroïdienne prend toute son importance si on ne veut pas rater le véritable diagnostic. Il faut attirer l’attention sur ces liens étroits d’autant plus que, si la cause de la dépression ou de l’anxiété se situe au niveau thyroïdien, on va obtenir des résultats largement supérieurs comme c’est la règle en médecine lorsqu’on soigne la cause!
Certains auteurs vont jusqu’à prétendre que le trouble bipolaire n’existe pas en tant que tel et qu’il s’agit «toujours» d’un symptôme reflétant l’hypothyroïdie. Je n’irai pas jusque là mais, bon, dans mon expérience clinique, je dois avouer que ce fut très souvent le cas...